On commence la formation par une vue d’ensemble du monde associatif proposée par Yannick Blanc, vice-président de la Fonda.
Dans ce billet, l’exercice est subtile car je retranscris l’analyse du présentateur telle que je l’ai comprise, et je partage ce que j’en tire. En particulier, ce qui suit ne représente pas la position officielle de la Fonda, ni de Yannick Blanc, ni celle de Deuxfleurs au passage.
Pour placer le contexte, la Fonda est un think tank dont le sujet est les associations 1901, dans toute leur diversité. De ce fait, M. Blanc a proposé un panorama de cet écosystème tel qu’il est perçu par son think tank. Pour ma part, je retiens 5 axes de cette présentation : 1) Le paysage associatif en France, 2) Une société en crise, 3) la notion d’engagement, 4) La notion de charte et 5) quelques exemples illustrant les propos.
Le paysage associatif en France se porte bien.
L’orateur commence par mettre en perspective le ressenti des acteurs du monde associatif avec des chiffres collectées lors d’une grande étude national. Il note qu’il n’y a pas de baisse du bénévolat, que le financement est relativement stable (légère baisse), et que le nombre d’association augmente de manière importante au cours du temps (tendance depuis les années 80 au moins). Économiquement parlant, les associations représentent 10% du CA du privé et 3.3% du PIB. Selon lui, il est important de recontextualiser ces fait, car on vit beaucoup de choses à travers le miroir déformant des médias et de la politique, et donc on a tendance à sous-estimer l’importance du fait associatif en France.
Il décrit le milieu associatif comme composé de 3 secteurs très différentes : le secteur socio-medical (qui génère le plus de chiffre d’affaire car fonctionne comme délégation du service public), le secteur des loisirs et de la culture (qui regroupe le plus grand nombre d’association), et le secteur militant (qui regroupe le plus grand nombre de bénévoles).
Quant au profil des bénévoles, il note que 60% du temps de bénévolat est fourni par les jeunes retraités.
Je rajouterais que c’est eux aussi qui assurent une grande partie de la garde des enfants, et que c’est un des âges où on est le plus heureux dans la vie. Parce que c’est d’actualité, voici une bonne raison de défendre les retraites !
Une société en crise
Pour comprendre la société, M. Blanc propose un découpage en 3 modes d’organisation collective : institutionnel, entrepreneurial, coopératif. Il précise que chacun de ces modes d’action se différencient par par des pratiques différents, par une grammaire qui leur est propre.
L’institutionnel est défini comme la hiérarchie et la conformité, l’entrepreneuriat comme le contrat et l’obligation, et enfin le coopératif comme la charte et l’engagement.
Les deux premiers modes d’organisation sont en crises, et de ce fait, le mode coopératif semble d’autant plus désirable à beaucoup de monde.
Par la suite, on va se focaliser sur les deux concepts clés de la coopération : la charte et l’engagement.
Comprendre l’engagement
Ici, M. Blanc ne définit pas directement le concept d’engagement mais se base plutôt sur une étude d’opinion pour répondre à la question.
Il ressort du sondage, conduit par la fondation Jean Jaurès (assez proche du Parti Socialiste), que l’engagement est une valeur positive pour une majorité des français (82%). En pratique, quand on demande à ces personnes quelle forme prend leur engagement, il s’incarne majoritairement dans des actes individuels comme la signature d’une pétition, un don à une association ou du boycott (50% ou plus). D’autres formes d’engagement plus collectives, comme être membre d’une association pour une cause, d’un syndicat, ou d’un parti politique sont quant à elles beaucoup plus minoritaires (respectivement 10%, 4% et 2%).
En parallèle, quant on demande quel est le mode d’action le plus efficace, les interviewés répondent : s’engager dans une association (80%), voter (70%), faire un don (64%), signer une pétition (57%), en en tout dernier, adhérer à un parti politique (28%).
Ici, je retiens qu’entre les envies d’adhérer à une association, et le passage à l’action, il y a un gap important. Il peut être intéressant de réfléchir comment identifier et lever les points bloquants : proposer un engagement clairement délimité dans le temps, travailler l’accueil, etc.
La notion de charte
Le présentateur souligne qu’il n’y a pas de définition qui fasse consensus sur la nature de la charte. Ici plutôt que de partir sur une étude d’opinion, on s’attaque plus à des concepts et une observation qualitative des pratiques.
Il note que la charte peut être un travail de vérification que des systèmes de normes différents sont compatibles entre eux, mais que ça ne se limite pas à ça non plus.
Une charte consiste aussi à passer beaucoup de temps à se mettre d’accord sur les règles qu’on applique à nous même, règles qu’on élabore ensembles.
Il note que c’est très différent des deux autres modes d’organisation collective : dans le coopératif, les règles sont définies en interne, par celles et ceux à qui elles vont s’appliquer. Dans la hiérarchie et l’entreprise, les règles que l’on doit suivre sont définies de manière externe, les personnes sur qui elles s’appliquent n’ont pas (ou peu) de pouvoir sur leur élaboration.
Partant de ce désir d’aller vers le coopératif, M. Blanc nous explique comment les autres modes d’action “essaient d’hybrider” leur approche avec le coopératif. Il donne rapidement l’exemple d’une charte proposée par L’Oréal pour le mode d’action entrepreneurial. Pour l’État, il cite plusieurs initiatives : cités éducatives, tiers-lieux, PTCE, PAT, plan de lutte contre la pauvreté.
Le débat dans la salle tourne alors autour de la nature de cette hybridation : compromis ou compromission ?
Mais le présentateur notre qu’un grand nombre d’associations répondent à des besoins que personne d’autre n’est en mesure de remplir. En effet, il note que les administrations se sont beaucoup appauvries en compétence. Pour caricaturer, on pourrait dire qu’un fonctionnaire territoriale font aujourd’hui principalement des appels à projet : ils ne traitent plus directement les sujets mais cherchent vers qui se tourner pour le traiter.
D’un point de vue des politiques, il note que beaucoup d’entre eux agissent “à vue”. Dans sa carrière, M. Blanc a vu par exemple des maires de droite financer des associations dans leur ville en totale contradiction avec les positions de leur parti. Serions-nous ici dans la Realpolitik au final ?
J’en conclue ici que, pour peu qu’une association se rende indispensable - du moins utile, elle est en mesure d’engager un rapport de force avec les institutions. De ce fait, même en présence de pression, elle serait en mesure de faire valoir ses intérêts.
Des exemples
Yannick Blanc a donné plusieurs exemples de projets lors de cette présentation que je compile ici. Plus ou moins couronnés de succès, ils illustrent selon lui des possibilités d’avenir désirable pour le monde associatif.
Lancé en coordination avec les petits frères des pauvres et un secrétariat d’État, le programme Mona Lisa (MObilisation NAtional pour Lutter contre l’ISolation des personnes Agées) fonctionnait bien. Mais il s’est arrêté brusquement car il n’y avait pas de ligne budgétaire du côté de l’État pour la coordination du projet au niveau national. Ici, M. Blanc interprète cet échec comme l’incapacité une incapacité de l’institution d’identifier l’importance de ce projet.
Le projet ECHO quant à lui touche au médical et est toujours fonctionnel. Il a été développé au Nouveau Mexique (États-Unis) pour améliorer l’accès au soin, surtout des plus pauvres. Il suit le modèle XRX (expertise / ressource / expérience). Je vous laisser chercher ce que c’est, c’est une référence gratuite. En pratique il vise à mettre en place des outils numériques pour permettre au personnel médical de terrain (infirmier-es, etc.) d’interagir avec des expert-es (médecins spécialistes), via de la visioconférence par exemple. Dans l’autre sens, le personnel médical collecte et remonte des données du terrain pour les expert-es. On a donc ici un exemple de coopération entre plusieurs corps de métiers.
Enfin, M. Blanc cite Julien Talpin, un sociologue (et membre de l’Observatoire des Libertés Associatives) qui a travaillé sur le financement des associations. Il a entre autre travaillé à Tourcoing sur une temporalité suffisamment longue pour observer une alternance politique à la mairie. Il constate que le changement de majorité à la municipalité de Tourcoing n’a pas impacté (significativement) le financement des associations. J’imagine que c’est ici un exemple de plus de la Realpolitik de nos élus locaux.
En conclusion
À la suite de cette présentation, je retiens que selon la Fonda, l’écosystème associatif se porte bien en France, que son modèle coopératif est désirable dans une société en crise. Ce mode d’action coopératif est soutenu par les concepts d’engagement et de charte, qui faute d’avoir une définition évidente, peuvent être approchés de différentes manières. Au delà de ces points communs, le monde associatif est aussi très divers dans ses actions et son fonctionnement, comme l’illustre la décomposition médico-social, militant, et culturel/loisir qui nous a été présenté.
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